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Erreurs judiciaires reconnues
?

    Retour à la carte de France de ceux qui dérapent dans les institutions
Source VSD 14 décembre 2005 :
Texte recopié ci-dessous
Dans mon affaire les juges d'instructions ont préféré céder aux pressions et protéger les policiers ripoux ! !

Texte recopié :


AGRET Roland
Dils Patrick
Masse Myriam

OUTREAU

ROCHEPAULE

SECHER

BOREL

 

Son visage porte encore les stigmates de la souffrance. À 35 ans, marqué à jamais par l'épreuve, Patrick Dils ne sera plus jamais un homme comme les autres. Il est au-jourd'hui le symbole de l'erreur judiciaire en France : accusé à l'âge de 16 ans du crime de deux jeunes garçons, Alexandre Beckrich et Cyril Beining, retrouvés morts à Montigny-lès-Metz en septembre 1986, Patrick Dils a passé quinze années en prison avant d'être totalement blanchi, en avril 2002, par la cour d'assises de Lyon. La présence du tueur en série Francis Heaulme, à Montigny-lès-Metz, le jour du meurtre, a été à l'ori-gine de l'acquittement de Patrick Dils, qui avait d'abord été condamné en 1989 à la prison à perpétuité, puis à vingt-cinq ans de réclusion en 2001.
Aujourd'hui, Patrick Dils vit dans l'est de la France, quelque part près de la frontière suisse et n'aspire qu'à la tranquillité. Pour VSD, il a accepté de sortir de l'ombre et de se raconter.
VSD. Quelle est votre réaction, après le procès d'Outreau ?
Patrick Dils. J'ai l'impression que la justice n'a pas pris cons-cience de ses erreurs et qu'elle a du mal à évoluer et à se rendre compte qu'elle est faillible. Ce pro-cès a aussi été l'illustration de la faillite des experts psychiatres, auxquels on accorde beaucoup trop de poids. Peut-on imaginer un seul instant le drame de ces familles déchirées et détruites ? Après toutes ces années de galère, je suis heureux qu'elles puissent maintenant prétendre à des répa-rations financières. C'est la pre-mière chose qu'on leur doit. Mais je me réjouis surtout qu'elles aient obtenu des excuses du chef de l'État et qu'elles aient été reçues par le Premier ministre. Moi, je n'ai jamais eu d'excuses, je n'ai même pas reçu un mot de com-passion. Je l'aurais souhaité, sur-tout par rapport à mes parents qui se sont battus, sans compter, pour moi pendant toutes ces années.
VSD. Qu'auriez-vous envie de dire aux familles des acquittés d'Outreau ?
P D. J'ai envie de leur dire : relevez la tête, soyez fières de porter votre nom et profitez maintenant plei-nement de la vie!
VSD. Vous êtes aujourd'hui le symbole de l'erreur judiciaire en France. Comment vivez-vous avec ce statut ?
P. D. Il y en a qui mettent toute une vie à devenir célèbres. Moi, je vais passer le restant de mes Jours à essayer de retomber dans l'anonymat. Mais mon nom fait maintenant partie de l'histoire ju-diciaire, et je sais que je n'y réussirai jamais complètement. Et je n'en ai finalement pas envie, car je me dis crue mon expérience peut aujourd'hui servir à d'autres, en témoignant çà et là quand cela est utile.
"Peut-on chiffrer le préjudice moral et les souffrances endurés pendant quinze ans ?"
VSD. Quelle est la célèbre erreur judiciaire dont vous vous sentez le plus proche ?
P D. Il y en a beaucoup, mais je crois que c'est l'affaire Seznec, une histoire qui me passionne. J'ad-mire le combat acharné de Denis Seznec, qui défend la cause de son grand-père et qui continue de se battre depuis des années pour l'honneur de sa famille. Je lui tire mon chapeau.
VSD. Comment avez-vous vécu votre sortie de prison ?
P D. C'était un peu irréel, même si je n'ai lamais douté que je sorti-rais un jour la tête haute, par la grande porte, et lavé de tout soup-çon. La seule chose que je ne sa-vais pas, c'était où et quand. À force de l'espérer tellement fort, quand cela vous arrive, on se de-mande si tout cela est bien vrai. Durant mes premiers jours de li-berté, j'étais parfois en sueur le matin, en ouvrant les yeux: j'avais peur de voir des barreaux devant moi, de me dire que c'était seulement un rêve.
VSD. Qu'êtes vous devenu depuis votre remise en liberté ?
P. D. J'ai terminé, en prison, une formation de cuisi-nier que je n'ai malheureusement pas eu l'occasion de pratiquer. Je suis aujourd'hui magasinier ca-riste dans une entreprise de l'est de la France, dans le Doubs. J'es-saie d'être monsieur Tout le -monde. Je vais travailler tous les matins, je paie mes factures, mes impôts, j'ai mes amis, mes pa-rents. Je viens d'acheter une mai-son, et je m'y suis installé il y a quelques jours.
VSD. Vous avez aussi été cuisi-nier, lors de la tournée des Restos du cœur, en janvier dernier...
P D. Oui, et j'en garde un souvenir extraordinaire. J'ai rencontré des gens fabuleux comme Murielle Robin, Jean-Jacques Goldmai Garou ou Lââm. La plupart me connaissaient et m'ont parlé soutenu : " Mais qu'est-ce que vous faites là ? " me disaient-ils. Je leur répondais : " Je suis juste là pour vous servir. " Ce qui m'a bouleversé, c'est que de stars m'ont demandé mon livre (Je voulais juste rentrer chez moi,
éd. Michel Lafon, NDLR) et un dédicace. Lââm avait les larme aux yeux.
VSD. Comment réussir à se reconstruire après quinze années passées derrière les barreaux?
P. D. Je ne me suis jamais reconstruit, je me suis construit. Quand on entre en prison à 16 ans, on n'est encore qu'un gamin. Je me suis forgé une personnalité et un caractère en prison où j'ai rencontré des gens extraordinaires et bouleversants. J'étais un adolescent très introverti, terriblement timide. Je suis maintenant extraverti et je n'ai plus peur de la fout ni des gens. J'ai aussi appris à développer de nouveaux sens, comme le don et le partage.
VSD. Avez-vous des hobbys ?
P. D. J'aime toujours la philatélie même si c'est cette passion qui m'a plongé en enfer (le jour de l'assassinat, Patrick Dils cherchait de timbres, en faisant les poubelles dans sa rue de Montigny-lès-Mets en contrebas du talus et de la voie ferrée où seront retrouvés les corps sans vie des deux petits garçon; NDLR). Je pratique la natation. J'aime aussi les balades en campagne ou dans la forêt. Et puis, j'apprécie surtout de partager des moments intenses avec mes amis.
VSD. Les gens vous reconnais-sent-ils souvent, dans la rue ?
P D. Oui, ça arrive tout le temps mais ce n'est jamais quelque chose de pesant, c'est toujours agréable. Je n'ai jamais eu à subir de regard accusateurs ou haineux. Certaine personnes doivent ne pas m'apprécier, mais elles ne le montrent pas et, en tout cas, ne me le disent jamais en face.
VSD. Vos collègues de travail vous parlent-ils souvent de votre affaire ?
P. D. Ils savent qui je suis, mais) n'en parle pas. Si on me pose de questions, je réponds volontiers Mon nom fait partie de l'histoire et l'histoire fait partie de moi nom, c'est ainsi, je ne peux riel changer.
VSD. Avez-vous regardé le téléfilm de TF1, Dans la tête du..